La crise sanitaire actuelle causée par la pandémie du coronavirus SRAS-CoV-2 constitue une tragédie humaine sans précédent. Sans ignorer le bilan en vies humaines, les prévisions qui ont trait aux pertes d’emploi, aux défauts de remboursement de prêts, aux faillites et à une inévitable contraction économique sont elles aussi très sombres. Cependant, alors que les économies entament une réouverture prudente, une question se pose: comment la transition vers une économie à faibles émissions de carbone et résiliente face aux impacts des changements climatiques sera-t-elle soutenue par les programmes de relance économique? Chez CCG, nous suivons de près l’évolution de la situation et partageons avec vous nos informations, notre expertise et nos connaissances pour tenter de répondre à cette question épineuse.
Points forts:
Malgré la contraction générale de l’économie, il y aura probablement un scénario de reprise verte dans lequel les gouvernements du Québec, du Canada et de l’Union Européenne (UE) investiront des montants substantiels pour financer les projets de transition climatique.
Les entreprises et les municipalités auront des niveaux d’accès aux capitaux variables, en fonction de leur niveau de préparation.
Pour vous aider à vous préparer, votre organisation doit évaluer les risques, les opportunités, ses capacités internes et le paysage financier d’un scénario de relance verte.
Les plans de relance post COVID-19 constituent une occasion unique – et peut-être définitive – d’effectuer une transition vers une économie durable et résiliente.
Nous avons créé un répertoire de formations virtuelles pour les entreprises, les municipalités et les acteurs de la finance afin de vous aider à tirer profit des plans de relance économique verte.
La COVID-19 et le climat
Au cours des dernières semaines, des experts du climat ont tenté de spéculer sur les implications de la crise sanitaire sur la lutte contre les changements climatiques. Nombre d’entre eux ont souligné l’importance des plans de relance économique comme outil clé pour stabiliser la crise climatique.
S’il est tout à fait plausible que les émissions des gaz à effet de serre (GES) reviennent aux niveaux d’avant la pandémie de coronavirus, nous voyons, malgré tout, l’émergence d’un scénario plutôt positif accompagnant le redressement de l’économie. Nous l’appelons le scénario de la “reprise verte”, dans lequel nous prévoyons une forte augmentation des investissements dans des organisations et des projets qui intègrent des solutions liées à la transition climatique.
Nous pensons que ce scénario pourrait se réaliser pour deux raisons. Premièrement, de nombreux acteurs de la société civile, du secteur privé et, en particulier, financier au Québec, en Ontario, et au Canada poussent activement les gouvernements à adopter une approche économique, sociale et environnementale intégrée pour la relance post-COVID-19.
Même avant la crise, de grands gestionnaires d’actifs, tels que la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) et BlackRock, avaient commencé à intégrer des critères de durabilité dans la construction de leurs portefeuilles, à se retirer des investissements dans les combustibles fossiles, à investir dans des fonds d’impact, à voter par procuration, à offrir des produits d’investissement sans combustibles fossiles et à demander aux entreprises de divulguer leurs informations au moyen de cadres de divulgation de la durabilité, tels que la SASB et le TCFD.
Ainsi, nous pensons que les nouvelles décisions d’allocation de capital dans un scénario de reprise post-COVID-19 auront tendance à favoriser les projets et organisations à faible intensité de carbone et résiliente face aux impacts des changements climatiques, même en l’absence de directives gouvernementales fortes.
La deuxième raison, la plus importante selon nous, est que de nombreux responsables gouvernementaux considèrent :
- Les programmes de relance économique comme une occasion unique de faire progresser les solutions climatiques ;
- La transition vers une économie à faibles émissions de carbone et résiliente face aux impacts des changements climatiques comme un outil puissant pour aider l’économie à se redresser.
Au Québec, le gouvernement en place a annoncé, quelques mois après son élection, vouloir apporter un soutien économique à l’électrification de l’économie. Cela aura d’énormes répercussions sur la décarbonisation des transports et des procédés industriels, entre autres.
De plus, le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, a indiqué que l’environnement fera partie intégrante de la reprise économique, précisant que le très attendu Plan pour une économie verte (PEV), qui devait être annoncé fin mars, sera lancé dans les prochains mois ou prochaines semaines. Par conséquent, les outils existants de lutte contre les changements climatiques devraient être renforcés dès que les mesures de relance économique commenceront à être mises en œuvre.
Au niveau fédéral, le gouvernement du Canada adopte lui aussi une position proactive en matière de lutte contre les changements climatiques. Des plans de relance économique post-COVID-19 sont élaborés par des poids lourds de l’environnement, notamment le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson, la ministre de l’Infrastructure et des Collectivités (et prédécesseur de M. Wilkinson), Catherine McKenna, et le ministre du Patrimoine canadien (et fondateur d’Équiterre), Steven Guilbeault.
Alors qu’un plan de relance fédéral ne sera probablement pas prêt avant plusieurs mois, les premières réflexions du gouvernement libéral laissent à penser qu’un futur plan de relance économique canadien offrira une occasion unique de se concentrer sur le développement des technologies propres, le raccourcissement des chaînes d’approvisionnement, l’électrification du secteur des transports, le développement d’infrastructures à faibles émissions de carbone et d’autres initiatives qui permettraient au Canada d’atteindre les objectifs fixés par l’accord de Paris en matière de réduction de GES. Le plan de relance de l’économie verte du Canada pourrait atteindre 100 milliards de dollars, voire plus.
De l’autre côté de l’Atlantique, les gouvernements européens prévoient d’allouer jusqu’à 1 000 milliards de dollars pour relancer l’économie. Cette somme s’ajoute aux 500 à 1 000 milliards de dollars prévus dans le cadre du “Green Deal” de l’UE, ratifié fin mars. De nombreux investisseurs, dirigeants de grandes entreprises et politiciens font valoir qu’un plan de relance vert est essentiel pour se remettre de la pandémie de coronavirus. Ce point de vue est déjà adopté par la feuille de route de la Commission européenne pour la relance: “La transition verte et la transformation numérique joueront un rôle central et prioritaire dans la relance et la modernisation de notre économie”.
Plus fondamentalement, l’UE dispose de nombreux outils, tels que la taxonomie européenne sur le financement durable, la norme européenne sur les obligations vertes et les critères de référence pour la transition climatique, qui permettront de mettre en place un garde-fou respectueux du climat dans leurs plans de relance économique. En fait, nous pensons que l’augmentation de la demande de projets verts sera suffisamment importante pour que les investisseurs européens recherchent activement des projets et des entreprises vertes ici au Canada.
Votre organisation est-elle prête à montrer la voie?
Ensemble, nous pouvons anticiper un scénario de reprise verte dans lequel nous pouvons nous attendre à ce que les gouvernements québécois, canadien et européens injectent de grandes quantités de capitaux publics dans des projets visant la transition climatique. Naturellement, nous pensons que ceux qui sont prêts à mener leurs communautés vers une transition résiliente et à faible empreinte carbone seront ceux qui pourront facilement et rapidement accéder aux capitaux. Pour vous aider à évaluer si votre organisation est en mesure de prospérer dans le scénario de la relance verte, nous vous recommandons de suivre les étapes suivantes:
- Évaluez votre situation:
- Examinez vos capacités internes à développer et à déployer des solutions climatiques. Demandez-vous s’il existe des lacunes particulières à combler.
- Si vous ne l’avez pas encore fait, c’est le bon moment pour commencer à comptabiliser vos émissions de GES et les coûts carbone correspondants.
- Comprendre les risques et les opportunités de la transition – comment un scénario de relance verte va-t-il modifier la structure démographique, les technologies de l’information, les chaînes d’approvisionnement et, ce qui est peut-être le plus important, la capacité de votre organisation à accéder aux capitaux?
- Élaborer un plan d’intervention qui aide votre organisation à se positionner pour tirer profit d’un scénario de relance verte.
Il y a deux bonnes raisons pour lesquelles les dirigeants doivent se préparer à ce scénario. Premièrement, il s’agit d’une bonne gestion des risques financiers. Aucune équipe de direction ne veut manquer la vague inévitable de capitaux bon marché, voire gratuits, disponibles pour développer de nouvelles technologies, de nouveaux projets et de nouveaux marchés dans le domaine du climat. Il existe également de nombreuses possibilités de réduction des coûts en diminuant votre empreinte carbone ou en améliorant votre résilience climatique. Quoi qu’il en soit, la préparation à la relance verte peut vous aider à développer un avantage concurrentiel dans une économie post-COVID-19.
Enfin, et surtout, il s’agit d’une occasion unique – et peut-être définitive – d’effectuer une transition vers des sociétés à faibles émissions de carbone et résilientes face aux impacts des changements climatiques.